FIBRA

Résidence de recherche et de création du 1er septembre au 20 novembre 2022

Plus d’informations
https://fibracolectivo.com/
https://www.instagram.com/fibracolectivo/

© Martin Argyroglo, 2022

La démarche

Lauréates du Prix COAL Art et Environnement 2021, nos trois invitées, Gabriela Flores del Pozo, Lucia Monge et Gianine Tabja, expérimentent depuis 2019 à travers la création du collectif FIBRA, des projets collaboratifs à long terme, étudiant l’impact des com- portements citadins et industriels sur l’environnement, rassemblant dans leur atelier laboratoire en plein cœur de Lima, des données agronomiques, géographiques, confrontant les datas aux traditions populaires... Tous les signaux de dystopies écologiques.

FIBRA se traduit aussi bien de l’espagnol par fibre, ou fil à tisser, nerf, muscle. Le terme désigne tout autant la fibre optique que le filament neuronal ou cosmique. Le choix du nom résume à lui seul la complexité du travail collectif et des enjeux contemporains : ouvrir le dia- logue entre camarades artistes, avec les commu- nautés voisines, avec d’autres espèces, d’autres cultures, jusque-là minorées, utiliser les nouvelles technologies avec clairvoyance, sans qu’elles ne nous submergent ou ne nous hypnotisent, se sentir soi- même tout en faisant partie d’un tout.Pour Gabriela, Lucia et Gianine, faire partie de FIBRA est en soi une performance, une négociation où l’intime et le public, où la dimension individuelle et la dimension sociale s’interrogent mutuellement. Enchevêtrement, entrelacement des idées, des pratiques, des matériaux, des regards, sont pour elles un exercice quotidien. Ce qui est frappant, c’est que les a-priori sont au sein de FIBRA, décortiqués, questionnés, pour faire place à l’observation, à l’écoute. Avec la même douceur dans leurs échanges que la surface d’une sculpture de mycélium au toucher. Cette résidence, notre première résidence hors communauté européenne et de surcroît collective,

pourrait comme beaucoup d’œuvres d’artistes dont le processus est indissociable de la représentation finale, s’intituler : Untitled. En fait, elle est doublement mani- feste, dans le sens qu’elle est évidente, et qu’elle exprime une prise de position. La sculpture réalisée durant la résidence est un Manifesto, une combinaison de matériaux issus de la nature, œuvre composite qui peut évoquer les Combines de Robert Rauschenberg, mais celle-ci n’indique pas le passage de la Seconde Guerre mondiale et son absurdité mais dénonce les fourvoiements de l’Anthropocène.

L’artifice hybride se fabrique à partir de papier Amate, comme un codex inca éclaté, explosé, traversé d’une pièce de bois reposant sur un socle en stéatite, de terres cuites et de raphia. Une cartographie de papier, enchaînée à des anneaux d’argile, transpercée de fils noirs, invente des territoires imaginaires où la mémoire dessine les reliques d’un autre temps, celui des origines, celui tâché par les énergies fossiles qui, comme le serpent du monde d’en-dessous, symbole d’infini chez les Précolombiens, n’auraient jamais du être extraites, exploitées, transformées. La sculpture commune de nos trois artistes de FIBRA ressemble à une mue de serpent. C’est une peau-monde morte, celle de l’Anthropocène qui se disloque mais aussi un symbole de régénération. Il nous faut nous atteler à la concordance des temps, penser l’humanité comme proposition subordonnée à la

proposition principale qu’est l’environnement, adopter une nouvelle grammaire sensible, celle du Symbiocène, selon le terme forgé par le philosophe Glen Albrecht. Manifesto et FIBRA sont comme notre visage : asymétriques. Ils sont la manifestation d’une présence humaine, vivante, à l’opposé des créatures fabriquées par effet de miroir, virtuelles et monstrueuses.

Pour Gabriela, Lucia et Gianine, faire partie de FIBRA est en soi une performance, une négociation où l’intime et le public, où la dimension individuelle et la dimension sociale s’interrogent mutuellement. Enchevêtrement, entrelacement des idées, des pratiques, des matériaux, des regards, sont pour elles un exercice quotidien. Ce qui est frappant, c’est que les a-priori sont au sein de FIBRA, décortiqués, questionnés, pour faire place à l’observation, à l’écoute. Avec la même douceur dans leurs échanges que la surface d’une sculpture de mycélium au toucher. Cette résidence, notre première résidence hors communauté européenne et de surcroît collective,

pourrait comme beaucoup d’œuvres d’artistes dont le processus est indissociable de la représentation finale, s’intituler : Untitled. En fait, elle est doublement mani- feste, dans le sens qu’elle est évidente, et qu’elle exprime une prise de position. La sculpture réalisée durant la résidence est un Manifesto, une combinaison de matériaux issus de la nature, œuvre composite qui peut évoquer les Combines de Robert Rauschenberg, mais celle-ci n’indique pas le passage de la Seconde Guerre mondiale et son absurdité mais dénonce les fourvoiements de l’Anthropocène.

L’artifice hybride se fabrique à partir de papier Amate, comme un codex inca éclaté, explosé, traversé d’une pièce de bois reposant sur un socle en stéatite, de terres cuites et de raphia. Une cartographie de papier, enchaînée à des anneaux d’argile, transpercée de fils noirs, invente des territoires imaginaires où la mémoire dessine les reliques d’un autre temps, celui des origines, celui tâché par les énergies fossiles qui, comme le serpent du monde d’en-dessous, symbole d’infini chez les Précolombiens, n’auraient jamais du être extraites, exploitées, transformées. La sculpture commune de nos trois artistes de FIBRA ressemble à une mue de serpent. C’est une peau-monde morte, celle de l’Anthropocène qui se disloque mais aussi un symbole de régénération. Il nous faut nous atteler à la concordance des temps, penser l’humanité comme proposition subordonnée à la proposition principale qu’est l’environnement, adopter une nouvelle grammaire sensible, celle du Symbiocène, selon le terme forgé par le philosophe Glen Albrecht. Manifesto et FIBRA sont comme notre visage : asymétriques. Ils sont la manifestation d’une présence humaine, vivante, à l’opposé des créatures fabriquées par effet de miroir, virtuelles et monstrueuses.

CATHERINE DOBLER

Concordances pour pratiques asymétriques - Restitution de résidence

Crédits photographies - Martin Argyroglo